Où est passée la créativité ?
À l'heure où l'intelligence artificielle s'invite dans chaque pan de notre quotidien créatif, un phénomène soulève de vraies questions : la musique générée entièrement par IA et diffusée sur les plateformes de streaming. Un outil d'aide devenu, pour certains, une usine à contenus industrialisés. Faut-il s'en inquiéter ? Oui, et pour de bonnes raisons.
L'IA, une alliée au quotidien créatif
Soyons clairs : l'IA, en tant qu'assistante créative, est un outil fabuleux. Correction grammaticale, rédaction optimisée, traduction fluide, ou encore génération d'illustrations en quelques secondes — les bénéfices sont énormes pour de nombreux créateurs de contenus. Elle permet de gagner du temps, de fluidifier les idées, d'augmenter la productivité.
Dans le monde musical, l'IA est aussi un soutien précieux. Utiliser une intelligence artificielle pour générer une ligne de basse, un arpège ou même une harmonie est comparable à l'usage d'un outil comme Scaler : ce n'est pas une IA autonome, mais une solution pour stimuler la créativité. On parle alors d'un point de départ, jamais d'un aboutissement.
Créer, ce n'est pas remplir une case
Créer une musique, c'est partir de rien, affronter le vide et y poser un rythme, une texture, une âme. Les défauts, les hésitations, les imperfections font partie intégrante du processus. Le producteur de musique, qu'il soit beatmaker, compositeur ou sound designer, construit une œuvre avec son vécu, ses goûts, son savoir-faire.
Alors, lorsque des titres entièrement générés par IA sont mis en ligne sur Spotify, Apple Music ou Deezer avec des crédits d'« artiste »… le malaise est palpable. Quelle est la valeur artistique d'un morceau produit sans intention humaine, uniquement par algorithme ? À quel moment l'effort créatif devient-il un mirage ?
Deezer et les IA : une mesure salutaire
La décision prise par Deezer de signaler les morceaux générés par intelligence artificielle et de les démonétiser est un geste fort. Cela permet non seulement de clarifier les règles du jeu, mais aussi de préserver une forme de transparence pour les auditeurs. Quand l'algorithme se met à la composition, il est essentiel que le public en soit informé.
Car soyons honnêtes : si l'attrait économique disparaît, nombreux seront ceux à délaisser la musique IA générative. Sans profit, pas de poursuite. Un signal fort pour rappeler que l'authenticité a encore sa place dans l'écosystème musical.
L'IA comme catalyseur, pas comme artiste
Personne ne blâme l'usage de l'IA dans la création de musiques libres de droit pour des vidéos YouTube, podcasts, ou contenus éducatifs. De nombreux créateurs n'ont ni les moyens ni le temps de faire appel à des compositeurs. Dans ce cadre-là, la musique générée a tout son sens.
Mais quand on parle de se créditer comme artiste, avec un nom de scène, une couverture d'album, et une distribution sur toutes les plateformes… on flirte avec l'imposture. L'artiste, c'est celui qui doute, qui cherche, qui passe des heures à mixer une caisse claire ou à retoucher une mélodie. L'IA, elle, ne doute jamais.
Conclusion : l'humain avant tout
La technologie évolue, mais le besoin d'authenticité demeure. Si l'IA peut faciliter, améliorer, soutenir, elle ne doit jamais remplacer l'intention humaine dans la création artistique. Créer, c'est oser proposer quelque chose d'unique. Utiliser une IA pour nourrir sa créativité, oui. Mais publier des œuvres générées en masse pour être monétisées sous un faux vernis artistique, non.
À l'heure où le monde cherche du vrai, il est plus que jamais temps de défendre la musique humaine, celle qui vibre, qui trébuche parfois, mais qui raconte quelque chose de réel.